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Le kiosque du week-end: 19-20.08.17

 

 

Cette semaine, on part à la rencontre de Julian Assange dans un long article du New Yorker sur ses années d’isolement dans l’ambassade équatorienne de Londres, sur la semaine catastrophique de Trump; une analyse des « Angry White Boys » dans National Review et l’appel à l’action d’une journalisme américaine face au racisme; et enfin les éditions dominicales.

 

1. Bannon, le Barbare

 

 

  • C’est le dernier évènement (positif?) d’une nouvelle semaine – de vacances – catastrophique pour le président et son administration: Le départ de Steve Bannon, architecte de la victoire du candidat républicain et du programme « America First » et chef du clan des « nationalistes économiques » de la Maison Blanche, qui a annoncé dans la foulée retrouver la place qu’il occupait il y a tout juste un an, à la tête de Breitbart News.

 

  • Le lendemain de son départ, Steve Bannon a annoncé « partir en guerre pour Trump contre ses adversaires – à Washington, dans les médias et les grandes entreprises américaines » et surtout les « démocrates de la West Wing »: Ivanka Trump, son mari Jared, le conseiller économique Gary Cohn et Dina Powell, adjointe du conseiller à la sécurité nationale.
    Il compte, avec le soutien financier du milliardaire Bob Mercer, développer Breitbart et une nouvelle entreprise de média capable de concurrencer Fox News, qui selon Bannon, serait en train de virer centre droit sous l’influence des deux fils de Murdoch.

 

  • Donald Trump a salué le retour de Steve Bannon à Breitbart News où il sera plus utile à « attaquer les ‘fake médias’ [qui] ont besoin de concurrence. »
    Selon Mike Allen, « les discussions politiques au niveau national vont empirer, devenir de plus en plus toxiques, avec une lutte au sein de la droite qui pourrait être bien plus personnelle et âpre que les hostilités entre Républicains et Démocrates. »
    Si Trump ne supporte pas Bannon en ce moment, ce dernier va continuer à l’influencer car les deux hommes sont plus proches idéologiquement que le président ne l’est des « New Yorkais modérés » – Ivanka, Jared et Gary Cohn.

 

  • Dernière nouvelle: Sebastien Gorka, proche de Bannon, devrait lui aussi quitter la Maison Blanche

 


2. Julian Assange en exil

 

  • Julian Assange vient de passer les cinq dernières années de sa vie exilé et reclus dans l’ambassade équatorienne de Londres, surveillé 24 heures sur 24 par ses hôtes et les services secrets anglais, prêts à l’arrêter le jour où il sera obligé de sortir. Le journaliste du New Yorker, , qui le suit depuis ses premières aventures avec Wikileaks, en 2010, nous raconte le quotidien cauchemardesque de cet héros/vilain qui a tout sacrifié au nom d’une certaine conception de l’information.

L’univers d’Assange ces cinq dernières années s’est réduit à 30 mètres carrés qui se répartissent en une suite privée et quelques pièces qu’il partage avec le personnel équatorien. « C’est comme vivre dans une navette spatiale » l’un de ses amis m’explique. Pour des raisons de sécurité et parce que les paparazzi le guettent parfois en bas de l’immeuble, il ouvre rarement les rideaux durant la journée et se met rarement au balcon. Il vit dans un état de crainte permanente, celle de voir l’ambassade assiégée à tout moment. Après son arrivée [en 2012], les Anglais ont essayé de retirer les protections diplomatiques de l’ambassade pour l’appréhender de force. Ce à quoi le premier ministre équatorien a répondu: « Nous ne sommes pas une colonie britannique ».
Assange m’avait lors dit, certain d’une arrestation imminente, qu’il avait préparé une paire de menottes pour s’attacher physiquement au consul équatorien. Après cela, les officiers anglais sont restés stationnés dehors et le harcelaient en frappant contre les murs à 4 heures du matin, et pendant un moment il a dormi dans une chambre différente toutes les nuits.

  • Si « l’ange déchu » est entouré quotidiennement par une poignée de fidèles activistes, soutenu par des amis et autres célébrités – la dernière en date, Pamela Anderson à qui on lui a prêté une relation – l’enfermement l’a diminué physiquement et psychologiquement; et son intervention très controversée lors de la campagne présidentielle américaine – la diffusion des emails piratés du Comité National Démocrate et du président de la campagne d’Hillary Clinton qui ont fragilisé la campagne de la candidate – l’ont isolé un peu plus sur la scène internationale.

George Gittoes [un artiste australien et ami de Assange] a tenté de m’expliquer la complexité de son soutien pour Assange.
« Je n’arrive pas à comprendre sa vision de Trump mais je lui laisse le bénéfice du doute (…) La raison pour laquelle je supporte Julian et que je le considère comme une inspiration est très simple. Il prouve qu’un individu peut encore s’opposer à des pouvoirs vis-à-vis desquels nous nous sentons tous oppressés. »

  • Aujourd’hui Assange n’a pas d’autre choix que d’accepter ceux qui sont encore prêts à le défendre et le soutenir, y compris Sarah Palin, Sean Hannity et autres trolls de l’alt-right qu’il « est content de voir intéressés par le projet de Wikileaks ».

    « Julian Assange, A Man Without a Country » – Raffi Khatchadourian / New Yorker

 


3. « Angry White Boys »

 

  • Excellente et violente critique de Kevin Williamson dans la revue conservatrice – et anti-Trump – National Review sur les militants des groupuscules d’extrême droite qui ont manifesté à Charlottesville en Virginie la semaine dernière, des « nationalistes blancs » qui n’ont aucun autre message que la colère et la haine de l’autre:

    Les jeunes blancs en colère n’ont aucun programme politique sérieux. Ils n’ont aucune revendication comme les Teamsters [le syndicat des conducteurs routiers américains] ou PETA [People for the Ethical Treatment of Animals], ils n’ont pas doctrine idéologique comme les Communistes, bien que ce serait faux de dire qu’ils n’ont aucune idéologie. Leur programme, c’est leur colère, une colère difficile à comprendre (…) Ils aiment se faire passer pour des « alpha males » comme si ils appartenaient à une troupe de chimpanzés – mais ça ne leur vient jamais à l’idée de se considérer comme des hommes déchus et rejetés. (…)
    Ce sont les produits d’une société libérale et démocratique tolérante qu’ils détestent – et à laquelle ils dépendent à la fois. (…)
    Qu’est-ce que recherchent ces jeunes blancs en colère? Le fait qu’ils se rassemblent pour se déguiser – et jouer à des jeux de cowboys et d’indiens parfois meurtriers – apporte un semblant de réponse. Ils veulent être autre chose que ce qu’ils sont. C’est la grande ironie de la politique identitaire: ils sont à la recherche d’une identité au sein d’une tribu car ils ont échoué en tant qu’individus.

  • « Angry White Boys » – Kevin D. Williamson / National Review

 


4. « Leçons de vie »

  • Kim Kingsley – ancienne directrice de Politico – revient sur le racisme ordinaire qu’elle observe depuis toujours dans sa ville natale de Pennsylvanie et sur la nécessité, en tant que « blanche », de sortir de sa bulle pour essayer de comprendre l’origine de ces comportements et de ces préjugés et de les combattre.

    Les suprémacistes blancs, manifestants néo-nazis de ce weekend sont des gens que l’on connaît. On les rencontre chaque jour, ce sont parfois des proches, et bien plus intégrés dans les infrastructures culturelles, institutionnelles, et politiques de ce pays qu’on ne le pense. Mais on n’en parle pas. Certains pensent que ca va disparaitre d’un jour à l’autre, certains que ce n’est pas un problème à régler et enfin d’autres n’ont aucun problème avec cela (…)
    Ce que j’espère, c’est qu’on puisse aujourd’hui sortir de notre univers confortable et confronter une réalité qui l’est moins.(…)
    Observons autour de nous, essayons d’analyser la diversité sur notre lieu de travail et comment l’améliorer. Ce n’est pas à la poignée d’employés issus des minorités de militer pour davantage de diversité. Ce sont les employés « blancs », quelles que soient leur position au sein de l’entreprise, qui ont la responsabilité de créer un lieu de travail où il y ait davantage de diversité au sein du personnel et des opinions, et prouver les bénéfices que pourraient en tirer l’entreprise.

    « My Life Lessons in Rust Belt Racism » – Kim Kingsley / Medium

 


5. Les editions dominicales

 

  • « Wrong Way » – Enquête du Tampa Bay Times à St Petersburg en Floride, où Isaiah Battle comptabilise à 15 ans le plus grand nombre de vols de voiture du comté de Pinellas.

    [Le journal] a identifié 14 enfants arrêtés pour avoir volé au moins cinq voitures entre janvier 2015 et juin 2016 (…) Tous ces délinquants sont males. Douze sont noirs, un est asiatique et un est blanc (…) La majorité à été évincé au moins une fois; quelques familles comme celle d’Isaiah, ont été expulsés à trois reprises.Tous viennent de familles brisées. Les parents ont porté plainte les uns contre les autres sur des tests de paternité et la pension alimentaire. Certains sont partis vivre en foyer. L’un a fugué. Onze ont vécu la violence domestique, leur mère battues par leur petits-amis, parfois devant eux. Six ont été victimes d’abus ou de négligence (…) Neuf étaient suspectés dans des rapports de police avant leur quatorzième anniversaire.

 

  • L’édito de l’Indianapolis Star, « Let’s Stand Against Hate. Together », en première page est un appel de plus cette semaine de la part de nombreux médias après les évènements de Charlottesville:

    Dans un moment aussi difficile, il est tentant de passer à autre chose – laisse le temps et le renouvellement de l’information nous distraire d’une réalité difficile qui est ressortie ces derniers jours. Mais il est nécessaire de faire face aux profondes divisions sur la race, la religion et l’ethnicité. Il est nécessaire de commencer un travail de fond pour renverser ces divisions.

Published in Le Kiosque de la semaine Revue de presse