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Ta-Neishi Coates: « O.J. Simpson n’était pas noir »

Dans le numéro d’Octobre de The Atlantic, l’intellectuel afro-américain Ta-Neishi Coates nous donne son opinion sur O.J.Simpson le joueur de football accusé puis acquitté du double meurtre de son ex-femme et de l’ami de cette dernière en 1994 à Los Angeles.

Agé de 19 ans, Ta-Neishi n’a à l’époque « aucune sympathie » pour le sportif, aucune compréhension de la sympathie qu’il provoque chez les miens, et aucune appréciation de la défense selon laquelle, Simpson aurait été aura été accusé parce que noir »

Une raison bien simple: « O.J. Simpson n’était pas noir » et « la seule lutte pour laquelle il s’est battu », à l’époque où Mohammed Ali a refusé de combattre au Vietnam, et des sportifs John Carlos et Tommie Smith levaient le point aux Jeux Olympiques, « c’était celle qui profitait à O.J. Simpson »

L’idée que Simpson existait au delà des frontières de l’Amérique noire ne reposait pas seulement sur une conscience politique étriquée, mais selon ses propres mots. Ma plus grande réussite (…) c’est que les gens me regardent comme un homme, et pas comme un noir.
(…)
Simpson a cherché à être post-racial dans un monde qui ne l’était pas. Sa myriade d’exploits n’a pas marqué l’érosion du grand mur qui séparait les noirs et les blancs aux Etats-Unis. C’est le résultat de la victoire personnelle de Simpson à surpasser cet obstacle. De l’autre côté, Simpson, un produit des HLMs de San Francisco, s’est réinventé grâce à la célébrité. Il est devenu riche. Il est allé chercher les conseils et l’attention d’hommes d’affaires. Et bien qu’il ait épousé Marguerite Whitley, qui était moire, l’année de son entrée à l’université de Southern California, il sortait désormais avec des blanches.

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Pour Coates, le soutien dont a bénéficié Simpson de la part d’une communauté noire qu’il n’a jamais soutenue, a été un « pas en arrière », qui « a manqué d’intelligence, politiquement immature et mal-conseillé ».

En se basant sur l’excellent documentaire en cinq parties de ESPN, O.J.:Made in America, l’auteur reconnait deux faits, le premier que Simpson était violent et qu’il a tué son ex-femme et le second que la police de Los Angeles était « une brutale armée d’occupation ».
C’est cette seconde réalité qui semble l’avoir emporté aux yeux du jury trois après ans après le passage à tabac de Rodney King par des policiers du LAPD qui avaient été acquittés provoquant des violentes émeutes à Los Angeles.

La vengeance de King a joué un rôle dans l’acquittement de Simpson (…) Mais cette revanche explique en partie seulement sa grande évasion. Ce que je n’arrivais pas à comprendre en 1994, c’est une réalité que les noirs autour de moi ont senti et l’un des points les plus gênants du documentaire: A savoir que Simpson ait effectivement tué son ex-femme et l’amie de celle-ci et que le jury ait eu raison de le déclarer non-coupable.
(…)
Le fait que O.J. Simpson ait fui la justice, soit retourné devant elle, ait été jugé pour meurtre, et encore échappé à la justice, représente la déclaration d’égalité la plus choquante depuis le mouvement des droits civiques. Simpson a tué Nicole Brown et Ron Goldman. Je m’en doutais à l’époque  et j’en suis certain aujourd’hui. Mais il s’en est sorti – de la même manière que les blancs ont tué pendant des siècles, des hommes et femmes noires, et s’en sont toujours sortis.

Published in A lire dans la Presse Société