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Amanda Knox, une affaire à sensations

Amanda Knox, le dernier documentaire criminel de Netflix, disponible en ligne depuis vendredi dernier, nous raconte, entre autres, comment la presse à sensation s’est emparée d’un fait divers macabre pour le transformer une « huge international bullshit story » grâce au témoignage de l’un de ses héros, Nick Pisa.

Rappel des faits: Une jeune Américaine de 20ans, Amanda Knox, est accusée du meurtre de sa roomate, Meredith Kercher, 22 ans, retrouvée assassinée et violée dans sa chambre de l’appartement qu’elles partageaient, un soir de novembre 2007 à Pérouse en Italie.

Elle est rapidement accusée de ce meurtre, avec la complicité de son petit ami de l’époque, Raffaele, rencontré trois semaines plus tôt, détenue en prison pendant deux ans avant d’être condamnée à 26 ans en 2010 pour être acquittée en 2011. Elle rentre alors pour la première fois aux Etats-Unis d’où elle assiste à son nouveau procès en 2013 pour laquelle elle condamnée de nouveau avant d’être définitivement acquittée en 2015.

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Le couple d’amoureux avait d’abord affirmé avoir passé ensemble la nuit du meurtre chez Raffaele avant de s’accuser l’un de l’autre sous la pression de la police. Leur attitude « inappropriée » selon les termes du procureur, Guiliano Mignini, vis-à-vis du meurtre de leur amie dans les jours qui ont suivi, avait choqué les enquêteurs, les habitants de Pérouse et renforcé les soupçons à leur égard.

Nick Pisa - "Amanda Knox" / Netflix
Nick Pisa – « Amanda Knox » / Netflix

Mais pas autant que l’autre star de ce documentaire, Nick Pisa, à l’époque journaliste freelance pour le tabloïd anglais The Sun, qui se remémore avec semble-t-il beaucoup de nostalgie l’état d’esprit dans lequel il a abordé l’affaire:
« Un meurtre, ça ramène toujours du monde, un peu d’intrigue, un peu de mystère, un whodunit (…) C’était un meurtre particulièrement atroce. La gorge coupée, à moitié nue, du sang partout … Qu’est-ce qu’on peut attendre de plus d’une histoire? La famille royale et le pape? » explique-t-il avec humour.
Le journaliste qui sait parler italien est devenu un interlocuteur privilégié avec le procureur, les enquêteurs et les médecins légistes, « qui se sont confiés à lui parce qu’ils se sentaient flattés d’être interviewés par un journaliste anglais. »

C’est la police locale, sous une pression médiatique sans précédent, qui émet la première l’hypothèse d’un crime en réunion impliquant des jeux sexuels. C’est ensuite Nick Pisa qui transforme ces hypothèses en scoops racoleurs qui font le tour du monde
« C’était notre scoop et ça a fait les unes du monde entier. Voir son nom en première page avec une « super histoire » dont tout le monde parle. C’est juste un buzz fantastique. C’est comme faire l’amour ou quelque chose comme ça. »

Il est difficile de nier le caractère sexiste et misogyne des accusations dont a été victime Knox tout au long de l’affaire et du documentaire: Entre le journaliste qui fantasme sur « l’intrigue sexuelle » entre Amanda et Meredith, un « girl on girl crime », qui parle « d’Orgie de la mort » entre les deux amants, et tous les noms dont elle est affublée (« femme fatale », « She-Devil », « dominatrice », « mangeuse d’hommes ») et les hypothèses du procureur Guiliano Mignini, un fan de Sherlock Holmes, pour qui « seule une femme aurait pu recouvrir le corps de sa victime après l’avoir tué » – comme le fut Kercher – tout simplement parce qu’un « homme ne le ferait pas ».

Capture d'écran d'un des articles écrits par Nick Pisa sur l'affaire Amanda Knox
Capture d’écran d’un des articles écrits par Nick Pisa sur l’affaire Amanda Knox

 

 

 

 

 

 

C’est lui qui a utilisé le terme « Foxy knoxy » le surnom que Knox s’était donnée sur MySpace, pour la désigner dans ses articles, lui qui a récupéré le journal intime qu’elle tenait en prison où figurait le nombre de ses partenaires sexuels, où elle raconte que les médecins lui ont dit qu’elle avait le Sida. Des informations qui ont fait la une des tabloïds du monde entier. « Il se trouve qu’elle n’était pas séropositive et que le police et le procureur jouaient avec ses émotions » admet-il encore une fois avec sourire.

Les principaux témoignages, celui d’Amanda Knox, de son ancien petit ami Raffaele Sollecito, du procureur Guiliano Mignini et du journaliste Nick Pisa, ne nous en apprennent pas davantage sur une enquête qui s’est arrêtée à la condamnation de Rudy Guede, une connaissance de Knox et Kercher, dont les empruntes ont été retrouvées sur les lieux du crime et sur le cadavre de cette dernière, à 16 ans de prison. Ce dernier, après avoir changé plusieurs fois sa version des faits accuse aujourd’hui Knox d’être responsable de la mort de Kercher.

Le seul qui semble être satisfait de la tournure de ces évènements, c’est le journaliste, Nick Pisa, qui a enchaîné pendant plusieurs années, « couvertures après couvertures, gros-titres après gros-titres » quitte à ce que certaines informations publiées à l’époque soient fausses et infondées, « mais qu’est ce qu’on est censés faire? On est journalistes, et ont rapporte ce qu’on nous dit. C’est pas comme si je pouvais dire, Attendez une minute, je veux pouvoir re-vérifier ça à ma façon et je laisse mon concurrent passer devant et j’ai perdu mon scoop. Ca ne marche pas comme ça pas dans l’industrie de l’information …

Published in Fais Divers