La sélection de ce week-end, c’est un portrait de Carl Icahn, milliardaire américain et ami de Trump, et son passage raté à la Maison Blanche, la campagne permanente de Trump qui a enchaîné les provocations cette semaine, une enquête sur le problème des cautions dans le système judiciaire américain, enfin sur l’industrie du sport qui oblige les enfants à devenir des athlètes professionnels de plus en plus tôt.
1. Une campagne permanente
- Après un discours « normal » – lu sur téléprompteur – devant un parterre de militaires lundi dernier au cours duquel il a annoncé l’envoi de quatre mille soldats supplémentaires en Afghanistan pour « éliminer le terrorisme », le président a retrouvé son naturel mardi soir à Phoenix, en Arizona, où il a offert à des supporters survoltés, un veritable meeting de campagne, malgré les réticences du maire de la ville, qui craignait de nouvelles échauffourées entre groupuscules d’extrême-droite et antifas.
- « Plein de rancoeurs, [Trump] il [y] a lancé l’une des attaques les plus mensongères et controversées contre les médias » en les accusant tour à tout d’avoir envenimé les manifestations racistes de Charlottesville, d’agir contre les intérêts du pays, de vouloir effacer son histoire » et a même réussi à ce que la foule chante « CNN sucks! CNN sucks! … Build that wall! build that wall! ».
Sur le bilan politique et législatif depuis son investiture, il a affirmé qu’aucun « président [n’avait] autant accompli lors des six, sept premiers mois de son mandat. »
Un véritable disque rayé qui, selon Brian Stelter de CNN, fait l’effet d’un « poison lent censé affaiblir les organes de presse tout en renforçant une présidence en difficulté. »
- Vendredi, le président a annoncé le pardon présidentiel de Joe Arpaio, auto proclamé le « shérif le plus dur des Etats-Unis » qui a officié pendant 24 ans dans le compté de Maricopa, en Arizona où il a mené une véritable « croisade contre l’immigration illégale » et été reconnu coupable l’année dernière de profilage racial à l’encontre des Latinos, « présumés illégaux » qu’il emprisonnait pour les livrer aux agents d’immigration.
La Maison Blanche a souligné dans un communiqué les « années de service admirable rendues à notre nation » d’un « patriote américain » qui « méritait » d’être pardonné. – The New York Times
Le décision a volontairement suscité les critiques des Démocrates mais aussi de nombreux Républicains comme le sénateur John Mc Cain – CNBC
2. Prisons américaines: Vers la fin du “Bail System »?
- Enquête de NBC News sur une “nouvelle vision de la justice américaine” basée sur « des données scientifiques, des recherches académiques et des algorithmes qui « [débarrasseraient] le système judiciaire actuel – et son principe de liberté sous caution – de ses préjugés [socio-économiques et ethniques] en gardant uniquement les détenus les plus dangereux derrière les barreaux.
Le système [anglo-saxon] de [liberté sous] caution permet en théorie à tous les prévenus, présumés innocent, de demeurer en liberté dans l’attente de leur procès. Mais acheter sa liberté est impossible pour ceux qui n’ont pas d’argent. Les plus défavorisés ont donc [aux Etats-Unis] bien plus de chances de rester enfermés et par conséquent d’être virés de leur boulot, de perdre la garde de leurs enfants, d’avouer quelque chose qu’ils n’ont pas fait, de faire de la prison et de souffrir des conséquences de leur condamnation. Ceux qui empruntent à des agences spécialisées dans la garantie de cautions judiciaires peuvent parfois s’endetter pour des années.
De l’autre côté, les riches [qui peuvent payer la caution] échappent à la prison quelle que soit l’accusation, y compris celle de meurtre.
L’injustice de ce système a déclenché une campagne nationale pour mettre fin au système de caution.
Par quoi le remplacer?
Dans le New Jersey, la réponse est l’algorythme, une formule mathématique qui détermine la probabilité qu’a un prévenu de retourner devant un juge ou être arrêté de nouveau.
- La formule est censée prendre en compte les antécédents criminels du prévenu et déterminer un pourcentage de chance de récidive qui est rapportée au juge. Si le procureur refuse ces conclusions, il doit fournir les arguments nécessaires pour convaincre le juge de ne pas suivre les résultats de l’algorithme.
- Ce système est expérimenté dans différents Etats (Arizona, Kentucky, New Jersey) et comtés américains (de Californie, Pennsylvanie, ….) et depuis son application dans le New Jersey il y a six mois, de nombreux détenus ont été libérés et les prisons désengorgées.
- Certaines décisions rendues par les algorithmes n’ont pas eu les effets escomptés [récidives et retours en prison] et donné de l’eau au moulin des défenseurs du système de caution et de son industrie mais elle en reste aujourd’hui la meilleure alternative et pourrait se développer à travers le pays.
3. L’échec du prédateur financier de Washington
- Comme Donald Trump, son ami de longue date qu’il a soutenu lors de la campagne présidentielle, Carl Icahn est un « milliardaire populiste” qui pense que l’économie n’a pas besoin de régulations et l’Etat ne doit pas s’ingérer dans l’économie de marché.
“L’un des hommes les plus influents de Wall Street”, Icahn, a comme le président des Etats-Unis réussi « grâce à sa capacité à intimider” ses adversaires [des entreprises en difficulté] qui lui a valu durant les années 80 une réputation de “prédateur financier” – dont il est très fier – en excellant dans l’art des OPAs hostiles et qui continue les affaires à plus de 80 ans, malgré une fortune de 17 milliards, pour garder la main.
- Si Icahn est l’un des seuls grands noms de la finance à avoir soutenu Trump – qui s’en est bien servi – c’est parce que le candidat lui avait promis de supprimer les régulations mises en place par l’Agence de Protection l’Environnement (EPA) qui oblige CVR Energy, la compagnie dont il est majoritaire, à payer des dizaines de millions de dollars d’impôts chaque année. “S’il est élu, Trump mettre à fin à cela” avait affirmé un Icahn confiant lors de la campagne avant d’assumer la fonction providentielle de « conseiller spécial du président [Trump] sur les questions de régulations” pour l’aider à résoudre les problèmes qui asphyxient les entreprises américaines.”
- Un poste non rémunéré pour lequel il n’a eu ni besoin se retirer de ses affaires (une vingtaine de compagnies), ni dévoiler d’éventuels conflits d’intérêts avec sa nouvelle fonction, et permis au stock de CVR Energy de doubler sa valeur en six mois – après une chute continue de 70% entre novembre 2015 et 2016 – qui lui a rapporté un demi milliard de dollars.
Mais Icahn est bien plus riche que la famille Trump et les membres de son cabinet réunis – et la possibilités de conseiller le président sur des régulations susceptibles d’avantager ses affaires le destinait à devenir encore plus riche. “Cette capacité d’influence et source d’enrichissement personnel sur les prises de décisions par un magnat [de la finance] dans et en dehors de l’administration est sans précédent. Dans le domaine de la corruption on n’avait jamais vu ça” affirme Robert Weissman qui gère l’association “public Citizen”.
- Le 18 août dernier, après avoir été désavoué par le président, Carl Icahn a démissionné de son poste
4. Les enfants, ces athlètes professionnels
- La cover story de Time magazine s’intéresse à l’industrie du sport pour enfants qui a engendré l’année dernière 15 milliards de dollars de revenus en transformant de jeunes passionnés en véritables professionnels grâce à des infrastructures sophistiquées et spécialisées, toujours plus de pression physique et psychologique sur les enfants et les parents, avec toujours plus de profits à la clé.
Joey Erace est un exemple extrême de ce qui est devenu une nouvelle réalité pour les jeunes athlètes en devenir et leur famille aux Etats-Unis. Partout dans le pays, des enfants de tous niveaux, quels que soient les sports, sont recrutés de plus en plus tôt par une industrie du sport pour enfants qui ressemble de plus en plus à celle des professionnels.
Les petites ligues de quartier, associations de foot locales et formations de baskets chrétiennes qui rassemblaient les jeunes au sein d’une communauté et ne coûtaient rien ont perdu de leur superbe et ont été progressivement remplacées par des clubs privés, une constellation éparse de centres de développement liés à des franchises, des équipes régionales dirigées par des entraîneurs inexpérimentés.
Les équipes les plus compétitives recherchent de nouveaux talents dans les tournois nationaux, d’autres prétendre appartenir à l’élite pour réclamer des sommes exorbitantes à des parents qui rêvent de voir leurs enfants réussir dans les équipes de lycée, et pourquoi pas à un avenir professionnel.« How Kids’ Sports Became a $15 Billion Industry » – Time magazine
5. Le hashtag fête ses dix ans
- Le premier hashtag, #Barcamp [une rencontre participative entre internautes] a été tweeté il y a dix ans par l’un des créateurs de cet évènement: L’idée était de créer des groupes en les liants automatiquement à des liens hyper-texte en utilisant le symbole « # » devant. »Twitter a d’abord rejeté l’idée en expliquant que les hashtags étaient uniquement utilisés par les « nerds » puis a finalement intégré le hashtag dans son coding en 2009″.
Depuis, les hashtags sont le langage internet et médias sociaux par excellence puisque les trois quarts des internautes les utilisent pour communiquer avec quelques hits comme #TBT (« Throw back Thursday » a été tweeté 120 millions de fois)Aujourd’hui, 125 millions de hashtags sont tweetés en moyenne chaque jour. Les hashtags les plus utilisés de ces dix dernières années l’ont été par des fans #MTVHottest, #MTVStars, #KCA.
Les hashtags utilisés pour une série télévisée, #The WalkingDead, pour un film #StarWars, pour un sport, #WorldCup, un sport américain, #SuperBowl
6. Le reste de l’actualité
- Village Voice va cesser de paraître.
L’hebdomadaire new yorkais créé en 1955, gratuit depuis 1996 et véritable « artefact d’un Downtown qui n’existe plus », va cesser de paraître, a annoncé la direction cette semaine – sans préciser quand – qui compte se rabattre sur la seule diffusion en ligne, avec des renouvellements de contenus quotidiens et non plus hebdomadaires. – New York Times - « Parfois certains discours ne valent pas d’être défendus ».
ACLU, The American Civil Liberties Union, a été beaucoup critiquée ces derniers jours pour avoir défendu devant un juge le droit des groupuscules d’extrême droite de manifester à Charlottesville. Selon Associated Press, la défense stricte du Premier Amendement, quel que soit la nature des propos, a pris un coup lorsqu’une manifestante est morte lors du rassemblement de Virginie, et a mené à la démission du représentant de ACLU en Virginie.