Bloomberg Businessweek consacrait la semaine dernière sa « cover story » au géant du « retail » américain, Walmart, et ses 4,500 grandes surfaces qui font face à une recrudescence sans précédent de violence dans l’ensemble du pays – au grand dam des autorités locales.
Des taux de criminalités en grandes surfaces
Selon l’hebdomadaire, un crime violent serait recensé chaque jour dans un Walmart du pays, aux côtés des dizaines de milliers de vols, incidents ou bagarres qui doivent être gérés par la police locale, souvent aux dépens du reste de la communauté.
Par crime violent, on entend des « tentatives d’enlèvements, de blessures à l’arme blanche, de coups de feu et meurtres » à l’instar de ce Walmart du nord est de Tulsa, dans l’Oklahoma, qui recense cinq vol à main armée depuis le début de l’année, le suicide par balle d’un homme suspecté de meurtre l’année dernière dans le parking de la grande surface, ou encore une fusillade qui a fait un mort et un blessé grave sur ce même parking en 2014.
Il n’est pas inhabituel pour le département d’envoyer un bus pour transporter tous les criminels que Ross [Officier du département de police de Tulsa, attaché au bureau de sécurité du Walmart local] arrête à Walmart. Le cahier journal du magasin contient plus de 126 pages et recense quelques de 5000 allées et venues sur ces cinq dernières années.
L’année dernière, la police a été appelé plus de 2000 fois par les quatre Walmart que compte Tulsa. En comparaison elle n’a été appelée que 300 fois par les quatre Target [autres chaines de « retail » plus petites et un peu plus chères] de la ville.
Effectivement il suffit de taper Walmart et Crime dans le moteur de recherche Google News, et vous trouverez ce mercredi 31 Août, un couple arrêté pour trafic de drogues dans un Walmart du Missouri lundi 29 Août, une femme poignardée par sa mère dans le parking d’un Walmart d’Alabama samedi dernier, ou encore une fausse alerte à la bombe d’un client dans le Wisconsin en Juillet.
Des immenses grandes surfaces difficiles à gérer
En Mai dernier, The Tampa Bay Times s’est lui aussi intéressé à la recrudescence de crimes dans les grandes surfaces de Tampa Bay en Floride: « Sur les 7 000 appels reçus par la police pour vols, la plupart ne dépassaient pas $300, le seuil au dessus duquel un « larcin » devient une infraction grave. Certains appels concernaient des vols de tablettes de chocolat à deux dollars, des goutes pour les yeux à trois dollars ou encore bouteilles d’essence à 10 dollars »v
Incapable de gérer les délits dans ses propres établissements, « les forces de l’ordre deviennent une compagnie de sécurité privée, payée par le contribuable pour Walmart »
Ces grandes surfaces qui vendent de la nourriture, de l’essence, des médicaments, sont considérées comme les centre-villes de certaines petites et moyennes agglomérations.
Ils accueillent 125 millions de consommateurs américains chaque semaine dans des grandes surfaces immenses (en moyenne 20 000 m2) dont certaines sont ouvertes 24 heures sur 24, sept jours sur sept et autorisent parfois leurs clients à stationner dans leur voiture toute la nuit.
Des conditions qui rendent la sécurité d’autant plus difficile.
Walmart tente de prendre le problème en main
Comme le rapporte le Time cet été, « la plus grande enseigne commerciale du pays, un passage presque obligé pour la police, a décidé de faire justice soi-même ».
Elle a mis en place un programme destiné aux coupables de larcins ou à ceux interpellés pour la première fois, qui ont la possibilité de compléter en ligne un programme de prévention contre le vol pour éviter la prison.
Avec « Restorative Justice », Walmart entend réduire l’intervention de la police pour les crimes mineurs en réglant le problème en interne et en offrant à certains une seconde chance.
Il semblerait que l’initiative ait porté ses fruits, à l’instar de la ville d’Arlington en Virginie, où la police aurait signalé 40% d’appels en moins de Walmart depuis la mise en place du programme en Octobre 2015.
Prévenir les vols et la violence a également obligé la direction de Walmart à équiper ses magasins de plus caméra de sécurité et d’agents de sécurité, et de changer régulièrement les équipes de postes.
Si elle se félicite des progrès accomplis, la police elle est plus sceptique.
Des effectifs diminués et une violence en hausse.
Pour BloombergBusinessWeek, la violence qui gangrène les Walmart du pays est directement liée aux politiques de coupes budgétaires qui ont marqué la politique interne de la compagnie depuis le début des années 2000.
Moins d’employés pour accueillir les clients, d’hôtes et hôtesses de caisses, mise en place de caisses automatiques ont certes augmenté les profits mais considérablement détérioré les magasins et leur sécurité.
« Pour les criminels, ces économies sont apparues comme le signal que tout le monde se foutait de Walmart, que personne ne surveillait et n’avait l’intention de les arrêter. »
Malgré des fonds débloqués pour rénover certains magasins, Walmart refuse de dépenser de l’argent pour augmenter drastiquement les effectifs de sécurité en uniforme, qui restent le rempart le plus efficace contre le vol.
Quelques 250 000 employés seraient nécessaire au million actuellement employés par l’enseigne qui couteraient plus de trois milliards de dollars à l’entreprise, soit un quart de ses profits réalisés en 2015.
Aucun investissement de ce type n’a été envisagé par la compagnie cette année.