Quelle qu’en soit l’issue, ces élections de mi-mandat s’inscriront dans l’histoire du pays, soit comme le triomphe de Trump qui peut déjà envisager une réélection en 2020 grâce notamment aux excellents résultats de l’économie américaine, soit comme le rejet d’un président qui n’a fait que diviser le pays ces deux dernières années et l’a précipité dans la violence.
La participation s’annonce déjà historique, à travers les trente millions de votes anticipés déjà enregistrés ce matin, à travers les acteurs qui se sont imposés ces 24 derniers mois: Les femmes, les jeunes et les indépendants du côté démocrate face à un électorat blanc toujours plus fidèle au président.
1. Les quotidiens
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Une journée historique
Les deux tabloïds new yorkais ce matin: aucune raison de s’inquiéter pour le pro-Trump New York Post qui affiche l’éternelle confiance du président, et celle plus sérieuse du New York Daily News.
Dans les deux cas, il s’agit d’un référendum sur Trump, et comme le remarque justement Mike Allen ce matin dans sa newsletter.
Il aura fallu attendre Trump pour réussir là où les bons samaritains, les militants, les politiciens, les publicités ont échoué: intéresser le public américain aux élections de mi-mandat et à l’importance du vote.
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Géorgie: L’ultime tentative de Kemp
Dans l’exemple peut-être le plus scandaleux des dérives partisanes au sein de l’administration d’une élection, le Secrétaire d’Etat de Géorgie, Brian Kemp, candidat au poste de gouverneur, également en charge du bon fonctionnement des élections, a accusé, sans aucune preuve, le Parti démocrate du piratage de sa base de données électorales.
Il a publié un article à ce sujet sur le site du Secrétaire d’Etat, que des milliers d’électeurs utilisent pour obtenir des informations sur le vote le jour du scrutin.C’est la dernière tentative d’une série de décisions politiques de Kemp, qui a déjà empêché l’inscription de plus de 50 000 électeurs [sur les listes électorales] pour des incohérences aussi minimes qu’un trait d’union manquant, qui s’est battu contre une loi permettant aux électeurs de prouver leur identité lorsque leur demande de vote par correspondance est rejetée.
Mais la dernière tentative effrayante de Kemp visant à accuser publiquement les Démocrates de piratage sans preuves est encore pire.
Kemp a été l’un des rares responsables d’élections à avoir refusé l’aide du Département fédéral de la Sécurité intérieure pour décourager le piratage des bases de données des électeurs. SlateDe nombreux démocrates demandent la démission de Kemp, qui porte les deux casquettes, mais ce dernier a toujours refusé et reçu le soutien de Trump.
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Les femmes candidates
Katie Hill a entendu les remarques « t’es intimidante » ou « t’es vraiment intense » tant de fois dans sa vie que cette femme de 31 ans a arrêté de compter.
Adolescente, elle s’est souvent retrouvée perplexe devant ces jugements en se demandant comment elle était censée réagir.La réponse? Se présenter aux élections.
Mardi, les électeurs californiens de la 25ème circonscription, située au nord de Los Angeles, auront la possibilité d’envoyer Hill, une novice en politique, qui a passé la majeure partie de sa vie adulte dans des associations d’aide aux sans-abris, au Congrès Américain.
On n’a jamais vu autant de femmes se présenter cette année, notamment en réaction face à Donald Trump.
Mais ce n’est pas seulement le nombre de femmes candidates qui font de 2018 une année spéciale, c’est aussi la manière dont elles se présentent. Après des décennies au cours desquelles on leur a dit de regarder, de parler et d’agir d’une certaine façon, les candidates américaines rejettent aujourd’hui le concept traditionnel d’éligibilité, en affichant fièrement leur force physique dans des clips de campagne où elles font de la boxe, de l’escalade, de la plongée sous-marine, etc. USA Today
2. Trumplandia: Les 5 scénarios des midterms
- Ces dernières semaines, le président a multiplié les meetings (dans les Etats rouges uniquement), les interviews, tweets incendiaires, les mensonges – plus en trois semaines que lors des neuf premiers de l’administration – et « a essayé de diaboliser ses rivaux tout en peignant une version apocalyptique des Etats-Unis qu’il préside [depuis deux ans] et qu’il aurait simultanément sauvés. WaPoSelon le même quotidien, Trump a fait 6 420 déclarations fausses ou mensongères depuis son investiture et s’il en faisant en moyenne cinq par jour lors de sa première année à la Maison Blanche, il en a fait environ trente par jour ces deux dernières semaines.
- Rien n’est sûr pour les Démocrates, censés surfer sur une « Blue Wave » il y a encore quelques mois devenus un clapotis voire une possible défaite mi-octobre avant la vague de violence – le MAGABomber et la fusillade de la synagogue de Pittsburgh – largement attribuée à la rhétorique incendiaire de Trump par la plupart des médias, qui a fragilisé le retour en force des Républicains.
Aujourd’hui, c’est la prudence qui domine.Néanmoins, le Washington Post offre cinq scénarios possibles concernant les résultats des élections de mi-mandat:- 1. Le plus probable selon les sondages: les Démocrates remportent la Chambre des Représentants avec une petite majorité et le Sénat reste aux mains des Républicains.
- 2. La « Blue Wave » permet aux Démocrates de remporter une quarantaine de sièges – notamment aux Texas et/ou dans le Tennessee – et ont réussi à se maintenir en Floride, dans l’Indiana, le Montana, le Missouri et la Virginie Occidentale.
Le Sénat est plus serré que prévu.
Ce serait un rejet pur et simple de Trump. - 3. La « Blue Wave » est un Tsunami, et permet aux Démocrates de remporter le Sénat grâce à des victoires au Texas (Beto O’Rourke bat Ted Cruz), dans le Dakota du Nord (Heidi Heitkamp bat Kevin Cramer) et/ou dans le Tennessee (Phil Bredesen bat Marsha Blackburn).
Très peu probable mais possible: le GOP perd le contrôle des deux chambres; l’élection de 2016 était un coup de chance extraordinaire et les divisions créées par Trump se retournent contre lui. - 4. Le rêve des Républicains: ils gardent le contrôle de la Chambre des Représentants et gagnent quelques sièges au Sénat, grâce à l’effet Kavanaugh.
C’est le chaos des experts en politique.
Cela suggère une fois de plus que les sondages ont sous-estimé le soutien électoral de Trump et continuent d’ignorer la manière dont il utilise les coalitions politiques.Le scénario catastrophe de Ryan Lizza pour Esquire.
S’ils ratent leur coup? Si les Démocrates doivent faire face à l’abysse d’une « Red Wave »? Et si les aspects les plus sombres du Trumpisme – l’attrait du racisme, le mépris pour la vérité et les faits, l’attaque contre la presse – survivent aux Midterms et en sortent renforcés?
1 chance sur 8 selon FiveThirtyEight.
- 5. Joker:
L’idée que nous puissions continuer à mal comprendre fondamentalement l’état d’esprit politique du pays, combinée à l’élection de 2016, signifie qu’il pourrait se passer quelque chose de complètement inattendue: peut-être que le GOP va garder la Chambre et les Démocrates remporter une petite majorité au Sénat. Peut-être que les Démocrates vont remporter la Chambre et le GOP le Sénat, …
3. Deux conservateurs sur les élections
- L’éditorialiste David Brooks offre une analyse assez intéressante des élections de mi-mandat – repéré par Axios:
Le mot-clé de cette élection, c’est « dégénéré » [« unraveling »].
Je pense qu’il y a un sentiment, du côté républicain comme du côté démocrate que les choses ont dégénéré.Chez les Républicains, c’est l’immigration qui entraîne un effondrement social. Les élites des médias sont responsables d’un effondrement culturel. Les liens sont de plus en plus distendus entre les hommes et les femmes sur les rôles de genre.
Du côté démocrate, on a le sentiment que les normes [du pays] s’effritent, que notre sens de l’unité et de tolérance s’effondre.
Ce n’est pas une élection normale, car elle provoque une angoisse existentielle et la peur que quelque chose de fondamentale est en train de se produire dans notre société. Oui, il s’agit de l’assurance-maladie. Oui, il s’agit de l’immigration.
Mais il existe une angoisse bien plus profonde par rapport à cette élection. - Invitée sur le plateau de Bill Maher ce week-end, la jeune éditorialiste du New York Times, Bari Weiss, évoque la position d’une partie de la communauté juive sur Donald Trump:
Ce qui est clair aujourd’hui, c’est qu’il y a beaucoup de Juifs, dont certains que je connais, qui soutiennent les décisions prises par Trump concernant Israël et le Moyen-Orient: le déplacement de la capitale à Jérusalem, que j’ai moi-même soutenu, l’annulation de l’Accord sur le nucléaire iranien.
Mais j’espère que cette semaine, les Juifs vont réaliser le prix de ce marché. Ils ont échangé cette politique contre les valeurs qui incarnent le peuple juif et l’Amérique depuis toujours: accueillir les étrangers, la dignité de tous les hommes, l’égalité devant la loi, respect pour la décence, l’amour de la vérité.
C’est ce qu’on est en train de perdre avec ce président et aucune politique ne vaut ce prix.
4. Les images du jour
- C’est Trump qui a posté cette affiche avant d’annoncer de nouvelles sanctions contre L’Iran ce week-end, et la réponse Qasem Soleimani, véritable héros de Guerre en Iran, Commandant des Forces spéciales des Gardiens de la Révolution Islamique.
5. Le tweet du Jour
Trump va aller en enfer.
Quiconque a lu la Bible peut vous dire ce qu’il en est des époux riches et volages.
La clé du pardon de Dieu est la repentance.
Toute la carrière politique de Trump a consisté en l’exact contraire.
Et puis ce papier est une véritable poubelle pour promouvoir « Trump et Dieu ».
- C’est la surprise envoyée la nuit dernière aux rédacteurs de l’un des rares quotidiens conservateurs de la capitale: A 2h13 du matin, le compte Twitter du Washington Examiner aurait été piraté, et le/la responsable s’en est donné à coeur joie contre le président.
Le tweet a bien entendu été effacé depuis.